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Julie Delpy revisite sa douce France dans « Les Barbares »

Quand elle est de passage à Paris, Julie Delpy retombe en jeunesse. Elle loge au-dessus de chez son père, Albert, dans un 18 mètres carrés du 15e arrondissement avec des fuites qui n’en finissent pas. Et, tous les soirs, elle le retrouve dans un restaurant vietnamien (parfois italien, libanais ou marocain), où ils échangent quelques mots sur la promotion du film, légèrement perturbée par l’état de santé de la réalisatrice. Cheville foulée et ménisque déchiré à Belle-Ile-en-Mer (Morbihan), opération prévue à son retour à Los Angeles. « Je vais passer deux mois sans pouvoir bouger, je vais prendre dix kilos, c’est déprimant…  », résume-t-elle. La vengeance des dieux bretons ?, ose-t-on lui demander.
Dans Les Barbares, une comédie de mœurs hilarante sur le racisme, les habitants de Paimpont, un village situé dans la forêt de Brocéliande, en Ille-et-Vilaine, se préparent à accueillir une famille de réfugiés ukrainiens. Mais, quelques jours avant la date prévue, une nouvelle vient contrarier leur geste de bonté : il s’agira de Syriens.
« Mon but n’était pas de me moquer de la commune où j’ai passé tous mes étés, enfant, chez ma tante. S’il y a bien une terre d’accueil, c’est la Bretagne ! Mais il faut se rendre à l’évidence. Qui, dans son entourage proche, n’a pas au moins une personne qui a hébergé des Ukrainiens ? Or il n’y a pas eu le même élan de générosité envers les Syriens, même au niveau de l’Etat, remarque-t-elle. Lorsque nous étions en repérage, un directeur d’école nous a expliqué que son établissement avait accueilli quatre enfants réfugiés, deux Ukrainiens et deux Syriens. Lui-même reconnaissait avoir fait toute une présentation sur la guerre en Ukraine, ce qui avait profondément blessé les Syriens, qui n’avait pas eu droit au même traitement. »
Dans le Paimpont de Julie Delpy, on trouve un éventail complet des différentes formes de racisme. Entre Joëlle, la professeure des écoles bienveillante et donneuse de leçons (Julie Delpy), et Hervé, le plombier (Laurent Lafitte, magistral) qui assume son hostilité envers les non-Bretons en général, il y a les racistes qui ne se sentent pas racistes, les racistes qui affirment que « dire “arabes”, ce n’est pas raciste », les « pas racistes » qui ont quand même des a priori…
« L’épicier n’aurait pas crié au vol quand Marwan [l’architecte syrien] goûte une noix, si ce dernier avait été ukrainien, suppose la réalisatrice. C’est arrivé à mon mari, un Grec qui ressemble comme deux gouttes d’eau à un homme du Proche-Orient. C’était à Belle-Ile, et la vendeuse lui a fait la leçon : “Ben oui ! Dans notre pays, on ne fait pas ça, etc.” J’ai hurlé : “Quel pays ? De quoi vous parlez ?” Je prends tout de suite position, surtout si on attaque mon mari ! Lui ne savait pas bien ce qui se passait car il ne parle pas un mot de français… Rétrospectivement, j’ai trouvé ça très drôle. J’en ai fait une scène parce qu’il y a cette idée que le monde tient dans une noix, microcosme de la tolérance, du racisme… En anglais, on dit “in a nutshell”, littéralement “dans une coquille de noix” , ce qui signifie “en résumé, en un mot”. Si Marwan avait été ukrainien, cette noix n’aurait eu aucune importance ! »
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